samedi 1 décembre 2007

L'absence d'absolu

En ce samedi soir de décembre, le premier de l'année, l'Élu et moi venons de terminer un documentaire intitulé The Trials of Darryl Hunt. Nous en ressortons émus, bouleversés et avec un sentiment profond de frustration et d'impuissance. Pour faire une histoire courte, le matin du 10 août 1984, une femme, blanche, a été violée, volée et poignardée à mort. On recherche un homme noir, de 20 à 35 ans. Darryl Hunt est arrêté, accusé du crime et trouvé coupable malgré son alibi. Il clame son innocence depuis la première minute de son arrestation. Ses avocats réussissent à lui épargner la peine de mort mais il est tout de même condamné à la prison à vie. Après 2 procès et une ribambelle de tentatives d'appel qui ont toutes échouées, malgré l'apparition de nouvelles preuves dont un test d'ADN qui innocentait Darryl Hunt, ce dernier est finalement libéré le 24 décembre 2003 et déclaré innocent en février 2004. Pendant 19 ans, un homme a été incarcéré à tort. Pendant 19 ans, d'autres hommes se sont battus pour faire reconnaître son innocence, en se battant contre un service de police corrompu, des procureurs qui dissimulaient des preuves, des juges qui refusaient de prendre en compte de nouvelles preuve. Ce combat s'est transformé en une quête contre le racisme encore tellement présent dans la ville de Winston-Salem, en Caroline du Nord.

Je vous suggère fortement de visionner ce film. Je me suis exprimée déjà à plusieurs reprises sur la «nouvelle politique» du gouvernement Harper en ce qui concerne les canadiens condamnés à mort à l'étranger, plus particulièrement le cas de Ronald Allen Smith, qui d'ailleurs serait peut-être innocent.

La peine de mort est la pire arrogance de l'homme. La justice des hommes est tout sauf absolue. Nous sommes des êtres faillibles, nos décisions et nos jugements le sont aussi. Aussi, aucune condamnation, même avec des aveux, ne peut être absolue et donc punie par la peine absolue: la mort. Je préfère mille fois voir un coupable en liberté qu'un innocent en prison. Aussi aberrant et immoral que cela puisse paraître à certains. Et c'est pourquoi j'ai mal à l'âme quand le Canada refuse d'entériner une motion de l'ONU qui se prononce contre la peine de mort. C'est pourquoi je frémis quand je vois des gens réclamer les pires châtiments pour certains criminels sur le principe du «Oeil pour oeil, dent pour dent».

«L'homme est un loup pour l'homme» - Thomas Hobbes

3 commentaires:

Le professeur masqué a dit...

Si je me sentais Canadien, j'aurais honte. Ah! Stephen Harper est en train de faire régresser le Canada de 40 ans. Et je ne parle même pas de l'image de ce pays sur la scène internationale...

Mais même juste en tant qu'humain, je ne crois pas qu'on puisse ôter la vie de la sorte à moins de conditions précises. Le moindre doute devrait nous éviter de commetre ce geste.

Brumaille a dit...

Tiens, ca me rappel un truc que j'avais entendu, je sais plus où ni quand: "Comment peut-on condamné à mort quelqu'un, alors que l'on ne sais pas ce qu'est la mort."

La Marsouine a dit...

@brumaille: Je l'ai déjà entendu aussi. Personnellement, malgré mon éducation judéo-chrétienne, je crois qu'au fond de moi, je sais (ou crois) bien que la mort signifie la disparition totale, le néant. Mais est-ce pire de tuer quelqu'un que de l'obliger à passer le reste de ses jours en sachant ce qu'il a fait? Et qu'en est-il de notre système carcéral, basé sur le principe de la réhabilitation?

@prof masqué: je n'ai pas voulu donner à mon billet une courbe souverainiste. Mais je vous avoue que j'ai failli ajouter après Canada: un pays dont j'ai de moins en moins envie de faire partie car je ne m'y identifie plus du tout. En effet, quand on voit Harper monter dans les sondages, même au Québec, snif, je vois difficilement comment je pourrais me sentir canadienne alors que je diffère tellement au sens de mes valeurs profondes. Mais n'oublions pas les maritimes et le NPD! :)