vendredi 18 janvier 2008

Le conflit amoureux

«Dupé par son attitude légère et inconsistante, convaincu que son offre n’est que le résultat de son propre ennui, il n’eut aucune pudeur à lui lancer au visage toutes les raisons pour lesquelles il ne pourrait jamais l’aimer, pourquoi il ne pourrait jamais la croire, pourquoi le simple fait qu’elle s’offre à lui n’est, à ses yeux, qu’une preuve supplémentaire qu’elle se joue de lui et tente de rire à ses dépends. Tout absorbé par sa diatribe vindicative, il ne voit pas les larmes qui coulent sur son visage, il ne voit pas ses épaules sursauter sous le coup de chacune de ses paroles, qui lui vont droit au cœur et la blesse plus que la lame ne saurait le faire. Il ne perçoit pas le rejet et l’insulte qu’elle ressent à chacun de ses propos, confirmant en son cœur cette insécurité maladive qu’elle dissimule tant bien que mal sous cette attitude désinvolte qui lui est propre. À la fin de sa tirade, il l’intime de ne pas feindre la douleur, qui n’est, selon lui, qu’une ultime tentative pour maintenir cette mascarade. Et puis le silence. Tentant de rassembler autour d’elle les lambeaux de sa dignité, ravalant son orgueil, elle essuya ses larmes et tenta de se lever, mais en vain. Retombant assise sur le lit, il comprit qu’il avait peut-être été trop loin. Il s’assit à côté à ses côté, elle lui tourna le dos aussitôt, refusant de révéler tout le mal qu’il venait de lui faire. Lentement, il comprit que sa colère était dirigé contre lui-même, lui qui avait tant souffert par le passé, lui qui s’était promis qu’on ne l’y reprendrait plus jamais. Il comprit que sa colère était issue de ses propres sentiments pour cette femme, belle et dangereuse, en qui il avait cru et à qui il avait fait confiance, confiance dont elle s’était finalement montrée digne, puisque personne jusque là ne lui avait accordé la sienne. Il comprit que cette femme était fragile et blessée par la vie, qu’il avait été pour elle une bouée, un mentor, un ami, quand tous les autres la répudiait. Et il comprit qu’il l’aimait et qu’elle l’aimait, elle aussi, malgré sa légèreté et sa désinvolture, qui cachait la vraie nature de ses sentiments. Lentement, il prit de ses mains le visage baigné des larmes qu’elle ne pouvait retenir. Il la regarda et lui sourit. Et malgré sa peur, malgré les risques, il rapprocha son visage du sien, lui murmura à l’oreille « S’il te plaît, ne joue pas avec moi » et l’embrassa. Elle se raidit sous le baiser qu’elle n’espérait plus et, lentement, ils plongèrent tout deux vers un horizon qu’ils n’avaient pas anticipé, vers un amour qui s’était sournoisement installé en eux, à leur insu. Ils comprirent que leurs blessures et leurs peurs les avaient instinctivement amenés à être sur leur garde. Enfin, finalement, ils s’abandonnaient à ce qu’ils avaient longtemps combattu, sans voir que leurs efforts ne pouvaient, ultimement, que les lier pour toujours.»

Dans toutes les histoires d'amour, qu'elles soient le centre de l'histoire elle-même ou une trame secondaire, les bonnes histoires d'amour ont toutes ce moment de tension extrême, ou tout peut basculer d'un côté ou de l'autre. Dans Pride and Predjudice, ce moment se produit quand Elizabeth visite Pemberley et que Darcy surgit à l'improviste. Oh bien sûr, il ne s'agit en rien d'un conflit comme la scène narrée plus haut, mais la tension et la surprise ont le même effet. Toutefois, les scènes qui me bouleversent le plus sont celles du conflit amoureux. La trentaine de lignes, ci-haut, qui résume une scène de cinq minutes environ de l'épisode en question (je ne vous dirai pas lequel), fait partie de celles-là. Je pourrais vous trouver une centaine de livres, films, séries, qui contiennent une scène de ce genre. Rien n'est réinventé. Et pourtant, chaque fois, mon coeur s'emballe, j'arrête de respirer et j'ai une boule dans la gorge jusqu'à ce qu'il ou elle (selon qui a le gros bout du bâton) embrasse l'autre. Comme quoi, quand c'est bien fait, je me surprend inévitablement à y croire...

2 commentaires:

Amor Niamor a dit...

Tu n'es pas la seule à avoir aimé ça. De plus en plus de gens autour de moi sortent du placard et avouent qu'ils ont adoré ce film.
Après tout, ce n'est ni la première ni la dernière fois que les critiques se plantent.

Amor Niamor a dit...

Oups ! Mon commentaire devait évidemment suivre ton entrée précédente sur L'Âge des ténèbres. Désolée !

:)